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jeudi, 25 septembre 2014

Un drôle d'été français - Vers un été de la délivrance

Vers un été de la délivrance

 

          Mon éditeur, comme tant de petites et moyennes entreprises en France, a déposé le bilan, enfin, on dit maintenant « se mettre en liquidation judiciaire ».
            Je relis mes carnets, remisés dans un placard. Je les trouve bien sombres. En harmonie avec le pays ? Non. Ce pays que tant d’observateurs jugent au bord du gouffre, je ne le trouve pas si mal. Et pourtant…

             La Commission européenne a poursuivi sa politique suicidaire : élargissement sans fin, avec la Croatie, la Lettonie. Comme nous, les Lettons avaient refusé par référendum l’entrée dans l’Union mais leurs élus, comme les autres, ont « rectifié » leur opinion. Dans l’indifférence la plus totale, la Commission s’est engagée dans des négociations pour des accords de libre-échange avec la Chine[1] et les Etats-Unis. On le sait déjà, son aveuglement et sa désunion l’en sortiront perdante.
            Quant à la troïka Union-FMI-Banque centrale, elle veille dans l’ombre, lançant quelques piques pour vérifier si les peuples européens sont suffisamment anesthésiés. Il y eut d’abord une expérimentation en réel à Chypre avec la confiscation des avoirs bancaires supérieurs 100 000 euros, ensuite des sorties opportunes de « pseudo-analyses » du FMI. Pour sortir l’Europe de la crise, il suffirait de taxer toute l’épargne disponible à hauteur de 10 %. Une telle ineptie ne mériterait qu’un éclat de rire. C’est le silence. La France pourtant serait la plus menacée de tous les pays de l’Union : elle compte, après l’Allemagne, le plus de fourmis : 15 % de notre revenu disponible est épargné, soit un stock de plus de huit années de revenu[2].

             Même silence sur le travail de sape à l’égard de la démocratie : la Commission européenne dispose désormais d’un droit de véto budgétaire sur les Lois de finances votées par les élus nationaux. Déjà, le travail de ces derniers se limitait pour une grande partie à l’introduction dans le droit national des fameuses directives. A quoi servent-ils aujourd’hui ?

            En France, l’imbécillité des dirigeants –imbécillité au sens du petit Larousse : « absence complète d’intelligence, de compréhension »- se double d’une panique abyssale face aux réactions pourtant timorées d’un peuple qui se refuse à mourir, d’un peuple qu’ils n’osent désigner par son nom, celui de Français. Aucun de nos ministres ne parle de la France. Ils ne parlent que de République. Celle-ci serait-elle menacée ? Mais par qui ?

            Nous vivons ce moment de l’histoire décrit par René Girard, ce moment où le recours au bouc émissaire ne fonctionne plus. Le bouc émissaire, c’est le peuple français, forcément raciste ou fainéant, c’est la France, forcément moisie.

            Oh, pendant si longtemps, nous avons fait semblant d’adhérer à ce discours. C’est que nous récoltions quelques miettes : du RSA, des 35 heures, une bonne couverture santé… Désormais, les caisses sont vides et, tandis que les élus continuent à bien vivre et à accumuler des patrimoines vite dissimulés en SCI, le bon peuple se retrouve sans rien. Il suffit de lire les rapports du Sénat ou du Parlement pour y trouver, noir sur blanc, la fin inéluctable, d’ici moins de dix ans, du système des retraites et de la sécurité sociale.
            Ne reste au peuple que son intelligence. Elle résiste à l’abêtissement organisé au sein de l’école, à celui vanté à la télévision. Conspué par le pouvoir, le printemps français a suscité dans le peuple, bien au-delà de ses participants, une volonté féroce de réfléchir. Réfléchir à l’avenir du pays, à son identité, à la re-création d’un nouvel ordre.
            La refondation de la France ne peut se limiter aux questions économiques et sociales. Elle se doit d’être anthropologique. Autrement dit : Qu’est-ce que la France ? Ceux-là même qui se félicitent de la dire métissée s’offusquent de ce que l’on ait enseigné aux gamins d’Algérie et de Dakar que leurs ancêtres étaient gaulois. C’est ne rien comprendre au concept de liberté, cette liberté élaborée d’abord à Athènes. Athènes où l’homme n’était plus un échelon dans une lignée mais un égal, « isoï » à tous les autres. Ensuite, Rome institua un droit universel pour faire vivre en bonne intelligence des hommes venus de toute l’Europe. Elle créa la « personne humaine », cet ego que Descartes, plus de six cents après, dira pensant : « ego sum, ego existo », « cogito, ergo sum »[3].
            Héritiers à la fois des Gaulois et des Francs, ce peuple venu de Germanie dont le nom signifie « libre », les Français se définissent par un seul trait : celui de la liberté. Le Français est un citoyen affranchi de ses origines, sociales ou ethniques. Plus que pour tout autre Européen, la liberté est pour lui un mode de vie, une construction intellectuelle qui abolit les différences ou, plutôt, les cantonne à la sphère privée. Et cette liberté, elle s’épanouit dans un cadre normé, celui d’un état qui fonctionne démocratiquement et exerce ses pouvoirs régaliens.
            Le problème majeur de la France aujourd’hui n’est ni le chômage, ni l’immigration. Ces derniers ne sont que la résultante d’un manque grave dans le fonctionnement de la France. Non, son malheur résulte de deux manques : le manque de démocratie, l’impuissance de son état.
Manque de démocratie ? Il suffit d’aller sur Wikipédia, à l’entrée « indice de démocratie ». La France ne cesse, comme pour le classement Pisa de ses écoliers, de dégringoler dans le classement : vingt-neuvième ! derrière l’Afrique du sud et devant la Slovénie.

             Quant à l’impuissance de l’Etat, elle se mesure par la perte de ses quatre pouvoirs régaliens. Le premier est le maintien de l’ordre public. Je ne rappellerai pas ici les émeutes à répétition, l’impunité des « petits » délinquants et « grands » fraudeurs fiscaux, lecteur, tu les connais aussi bien que moi.

            Le deuxième pouvoir, celui de définir la loi et de rendre la justice, est lui aussi encalminé. Moins par le manque de moyens, indéniable, que par l’abondance de lois et la longueur de leurs textes. Nul n’est censé ignorer la loi ? L’épaisseur moyenne d’un Journal officiel dépasse les 23 000 pages ! La réglementite aigüe ne se limite pas aux textes parlementaires, elle contamine les Codes du travail, de l’immobilier, de la construction, de l’environnement. Autant de fils de fer qui bradent toute volonté de se projeter dans le futur.

            Nous en arrivons maintenant au troisième pouvoir régalien, celui de battre monnaie. Il a été abandonné sans contrepartie aux mains de l’Union monétaire européenne -« no comment ».
            Ne reste à l’Etat français que le pouvoir d’assurer la sécurité extérieure du pays. Ces douze derniers mois, cela s’est traduit par des interventions en Afrique et des velléités en Syrie. On comprend alors la phrase de notre président allant visiter les soldats français au Mali : « la journée la plus importante de ma vie » ! Et oui, il n’y a que par l’envoi de troupes qu’il jouit véritablement de sa présidence. Et son successeur n’en aura plus l’usage, la loi de « programmation militaire 2014-2019 » supprimant plus de 20 000 postes…
            D’un côté la perte des pouvoirs régaliens, de l’autre l’écrasement des charges sur le peuple : près de la moitié de la richesse créée en France va à un Etat incapable de remplir plus d’une des quatre fonctions qui justifient son existence. Et le peuple commence à s’ébrouer.

             A vous qui m’avez reçue ces trois dernières années, à vous qui m’avez effrayée par votre pusillanimité, je vous dis « tant pis » ! Sans ironie, je l’affirme : nous vivons une époque formidable. Jamais comme aujourd’hui les créations humaines nous ont autant facilité la vie et donné le bien-être, jamais autant d’hommes n’ont aussi bien vécu et autant appris.

            Cette vitalité, au lieu de l’accompagner, vous la craignez. C’est vrai, elle redistribue les pouvoirs et vous avez peur de perdre le vôtre. Ignorez-vous que, par votre lâcheté, vous l’avez déjà perdu ? Vous n’avez pas su vous appuyer sur le peuple qui reste le plus créatif de tous les peuples d’Europe, le français. Hors des médias, dans les cafés, sur les réseaux sociaux, dans les cuisines, il peaufine son avenir et sa jeunesse est le plus en pointe. De ses discussions enflammées émergera bientôt une nouvelle France. C’est à elle que je dédie mes carnets.

 



 



[1] Voir le site de l’agence d’information chinoise : http://french.xinhuanet.com/chine/201310/25/c_132829650.htm

[2] Plus de 10.000 milliards d’euros selon l’INSEE

 

[3] Je suis, donc j’existe ; je pense, donc je suis.

 

08:15 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1)

Commentaires

Je m'intéresse à l'économie, je découvre votre blog et suis surpris de sa richesse. Je voulais en témoigner, ainsi que de mon soutien. Eric, de Bergerac

Écrit par : Eric | mardi, 11 novembre 2014

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