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jeudi, 25 septembre 2014

Un drôle d'été français - France, mère des arts, des lettres et des sciences

Vendredi 24 août 2012, vendredi 23 août 2013

 

France, ressaisis-toi

 

          La plage de Trouville est bleue, jaune, verte, aux couleurs des tee-shirts des centaines d’enfants emmenés au bord de la mer, comme chaque année, par le Secours populaire. L’organisation est bluffante. Des chanteurs de rap dynamisent une jeunesse qui n’en a pas besoin, tandis que des tout-petits se serrent contre leur accompagnatrice.

            Me revient l’apostrophe de Pompidou à Chirac : « Chirac, laissez-les Français tranquilles et tout se passera bien » ! Oui, laissez-nous tranquilles. Nous sommes capables, nous, de redresser le pays sans vous, « dirigeants » sans envergure. Nous sommes capables d’inventer, de créer mais, s’il vous plaît, ne nous mettez pas de bâtons dans les roues.

            Les mois ont passé. J’ai complété mes notes estivales, approfondi les échanges, fouillé auprès d’autres interlocuteurs. Dans le même temps, la France a poursuivi son enfouissement et son aveulissement. Moins de trois semaines après mon retour de Trouville, rançois Hollande se couchait devant Angela Merkel. L’occasion ? L’adoption du Mécanisme européen de stabilité[1], cette institution financière internationale de la zone euro créée pour soutenir les états en difficulté.             Concrètement, en cas de crise, chaque état de la zone apporte des fonds en garantie d’une levée de capitaux qui peut aller jusqu’à 700 milliards d’euros. La part de l’Allemagne a été fixée à 190 milliards, celle de la France à 142,7, de l’Italie à 125,4… Cependant, de tous les pays, seule l’Allemagne a obtenu le droit de ne pas payer. Elle s’est octroyée une « clause d’exemption »[2] par laquelle elle peut décider au dernier moment de ne pas apporter de capitaux si ses intérêts ne sont pas préservés. En d’autres termes, l’Allemagne « tient » tous les autres pays de la zone.

             Deux mois plus tard, c’est devant l’Espagne que le gouvernement s’abaissa. Il livra une de ses citoyennes, Aurore Martin, à la justice outre-Pyrénées pour des faits non répréhensibles en France[3]. Six autres mois après, nous perdimes toute honorabilité avec un ministre du budget, ex-spécialiste en implants capillaires, dont il apparut –merci Mediapart !- qu’il était aussi fraudeur fiscal. Le comble viendrait lorsque les ministres dévoileraient des patrimoines d’une petitesse étonnante au vu de leurs parcours. Vivent les SCI, démembrements de propriétés et donations avec réserves d’usufruits…

            Oh, je vous entends rétorquer que la France en a vu d’autres ! Que ce n’est pas la première fois de son histoire qu’elle se dote de dirigeants incapables. C’est vrai, mais nous nous trouvons à un tournant majeur de l’histoire de l’humanité. Les enjeux sont énormes : bouleversement climatique, urbanisation majoritaire, vieillissement de la population, enrichissement de milliards d’êtres humains, conflagration des connaissances scientifiques et technologies…
            Pour maîtriser la brutalité de ces transitions, il faut de l’intelligence. Et la France est l’un des rares pays au monde à porter au pinacle cette qualité. Dès ses balbutiements, même lorsque l’aristocratie et le clergé se partageaient les rênes du pouvoir, elle a toujours laissé « monter » les grands esprits. Là où l’Angleterre anoblissait industriels ou commerçants, la France honorait ses scientifiques, auteurs ou penseurs. L’école y a existé bien avant Jules Ferry. A la fin de l’ancien régime, un tiers des Français savaient lire et, un peu moins, écrire[4]. Dans un pays où Voltaire lançait au chevalier de Rohan qui le faisait rosser pour avoir lutiné sa maîtresse : « je commence mon nom et vous finissez le vôtre ! », le pire des crimes est d’agir contre l’esprit. Il n’y a que les Italiens pour considérer la peinture « cosa mentale ».
            Force est de dire que le gouvernement actuel pêche par imbécillité, une imbécillité d’un type nouveau, une imbécillité sexuelle. Le sexe est devenu l’alpha et l’omega de nos dirigeants. La constitution du gouvernement ? trente-quatre ministres ! plus de deux fois que pour l’administration Obama en charge d’une population presque cinq fois supérieure à la française. Mais il fallait des femmes. Pas des cerveaux, pas du courage, pas l’intelligence des situations historiques, pas du charisme. Non, du sexe, et du féminin. Le ridicule ne tue plus – qui connaît Victorin Lurel, Valérie Fourneyron, Thierry Repentin, Kader Arif ou Hélène ConwayMouret[5] ? Qu’importe, à défaut d’être meurtrier, le ridicule se contente aujourd’hui de coûter cher[6]

            Mais c’est avec le « mariage pour tous » que nous nous sommes le plus profondément et le plus longtemps vautré dans l’imbécillité sexuelle. Le déni de la réalité poussé au paroxysme, le travestissement du beau mot d’égalité, le psychodrame qui jette des millions de Français dans les rues… Qu’y sont-ils venus faire ? « créer l’affrontement et le désordre et s’en prendre aux symboles de la République qu’ils haïssent »[7] ? Non, et il faut dépasser les visions simplistes.

            Les catholiques ont été les principaux moteurs et acteurs du refus du mariage pour tous mais ils n’étaient pas seuls. La levée de ces citoyens ne doit rien à l’homophobie mais tout à l’intelligence. Plus ou moins confusément, sans avoir lu Heidegger, ils ont compris que ce qui était en jeu derrière l’ouverture du mariage aux homosexuels, c’était l’articulation entre les avancées de la science et les soubassements de l’humanité. Alors que nos dirigeants n’ont que le mot de « République » à la bouche, cette loi est contraire à ses fondements.
            En France, la république est fille de Montesquieu –séparation des pouvoirs- et de Rousseau. Pour ce dernier, la nature est organisée de façon rationnelle et les lois des hommes doivent s'en inspirer, notamment en ce qui concerne la liberté individuelle, la primauté des contrats, le droit de propriété et, last but not least, le droit de la famille... Nous avons le droit de contester l'universalisme des philosophes des Lumières mais alors il faut savoir, comme l'a très bien analysé le ministre de la Justice Christiane Taubira, que l'on change de civilisation. Mais quelle civilisation ? Elles ne se valent pas toutes...
            Et pendant ce temps, nous cheminons, accablés d’impôts, d’impuissance gouvernementale et de chômage.
            Le gouvernement actuel devrait s’inquiéter. Non de la montée du Front national mais d’un renversement plus brutal. Si l’histoire bégaie, elle n’en présente pas moins des constantes. Depuis plus de deux cents ans, les renversements de gouvernement ou les désordres ont toujours été le fruit soit de la bêtise du dirigeant –Louis XVI, Charles X en 1830, Louis-Philippe en 1848[8]- soit d’une incapacité à assurer le respect de la France –gouvernement Paul Reynaud en juin 1940, gouvernement Félix Gaillard en 1958.

           Le gouvernement Jean-Charles Ayrault cumule les deux tares.


 

 

 

 



[1] Voir plus haut, dans la journée du 9 août.

[2] Arrêt du 12 septembre 2012 de la cour de Karlsruhe : « La République fédérale d'Allemagne doit affirmer qu'elle n'acceptera pas d'être liée par le traité du MES dans son ensemble si la moindre des réserves qu'elle pourrait avoir s'avérait vaine »

[3] Aurore Martin est membre du parti indépendantiste basque et transfrontières Batasuna, considéré comme organisation terroriste en Espagne mais pas en France. Elle sera finalement libérée sous caution en décembre 2012 et autorisée à revenir en France.

[4] Enquête du recteur Louis Maggiolo, lancée en 1877, à partir des signatures des époux sur les registres de mariage.

[5] Vous ! désormais, vous les connaissez : Victorin Lurel, ministre des outre-mers, Valérie Fourneyron, ministre des sports, de l’éducation populaire et de la vie associative, Thierry Repentin, ministre délégué à la formation professionnelle et à l’apprentissage, Kader Arif,ministre délégué aux Anciens combattants ou Hélène ConwayMouret, ministre déléguée aux Français de l’étranger.

[6] 4,217 millions d’euros par an pour l’ensemble du gouvernement, selon les calculs du journal Le Monde.

[7] Propos tenus par le ministre de l’intérieur le 24 mai 2013.

[8] Chateaubriand : « Philippe n’est pas un vrai roi, c’est le prévôt ou le grand sergent de la ville de la Royauté à qui l’Europe crache au visage : le délateur patenté s’essuie et remercie, pourvu qu’on le maintienne dans sa place ».

 

08:15 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0)

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