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samedi, 13 février 2010

Comment attaquer une monnaie

Où trouver l'argent pour attaquer l'euro ? Pour leurs attaques contre les emprunts des Etats « PIGS » (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne), les investisseurs ont besoin d'argent. Une denrée rare pour les entreprises mais copieuse pour les banques. Depuis dix-huit mois, celles-ci se refont une santé opulante en accordant des prêts avec un taux d'intérêt annuel de 19 % par exemple pour le crédit à la consommation en France mais à partir d'argent qui leur a été octroyé à moins de 1 % par les Banques centrales.

Cette matière première, il est bien moins intéressant pour les banques de la prêter à des entreprises qu'à des investisseurs qui vont attaquer une monnaie. En effet, les gains de ces derniers sont très probables, contrairement aux risques inhérents à l'investissement industriel, tandis que les banques sont certaines d'engranger des commissions élevées. Sur les prêts accordés d'abord ; ensuite sur les opérations à terme des investisseurs contre l'euro. En effet, dans l'« euro-bashing » auquel nous assistons depuis deux semaines, les acteurs ne jettent pas leurs capitaux directement dans la bataille. Ils parient en effet sur une baisse de l'euro en achetant, à terme, du dollar, tout en vendant, toujours à terme, de l'euro. A Chicago, le marché à terme CTFC (Commodity Futures Trading Commission) a enregistré, le 2 février dernier, un niveau record de contrats vendeurs nets de positions non commerciales. Et cette dynamique ne devrait pas s'arrêter rapidement.
L'intérêt de ce type de comportement est qu'il est presque à coup sur gagnant, à la seule condition que les attaqués accusent déjà des signes de faiblesse et c'est le cas pour les PIGS, comme pour l'Union monétaire européenne. S'il est gagnant, c'est qu'il s'auto-réalise : plus vous attaquez des emprunts d'Etat ou une monnaie en les vendant à terme, plus ils se déprécieront et plus votre gain sera élevé. Ainsi, cette semaine, les enchères des emprunts d'état portugais se sont-elles mal passé : le Portugal a dû consentir des intérêts plus élevés pour trouver des acheteurs.

Que nul ne s'étonne de voir qualifier ici d'investisseurs ceux qui spéculent sur les monnaies et les emprunts, contraignant les Etats, non faillibles, à imposer à leurs citoyens des politiques économiques restrictives en période de crise. Les stratégies employées par les hedgefunds le sont au service des fonds de pension, c'est-à-dire des caisses de retraite qui doivent verser à leurs ayant-droits des niveaux de pension garantis. En 1998, lors de la crise monétaire de l'Asie du Sud-Est, c'était Calpers, le fonds de retraite des enseignants californiens, qui avait fait ployer la Thaïlande. Aujourd'hui, est venu le tour de l'Europe.

 

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